mardi 11 novembre 2014

Porte de Charenton

Des trains, des voies ferrées et des vaisseaux fantômes, à la Porte de Charenton le temps orange est suspendu...

Paris Porte Charenton RER D Technicentre voies ferrées rails

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 Rien ne bouge, aucun bruit, pourtant les trains glissent, les feux de signalisation vont et vient.

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Le lifting de Gloria Swanson



A quoi sert une centrale électrique qui ne produit plus d’énergie ? Un entrepôt vide ? Une usine d’où ne sortira plus jamais aucune voiture ? Pistes diverses : piège mortel pour chiens errants en attendant un délabrement progressif ;  terrain de jeu institutionnalisé pour reconversion en atelier, galerie ;  stock de matériaux de déconstruction devenus rares, briques, acier, meulière, dans l’optique d’une table rase bien propre…Actuellement, les projets les plus emblématiques et qui suscitent le plus d’engouement pour réinvestir un ancien site industriel reste la conservation plus ou moins partielle en vue d’en faire des espaces propices à une expérience client agréable et rentable. 


Qui peut s’opposer et se plaindre à cette tendance ? Des édifices emblématiques de l’histoire industrielle occidentale, à l’architecture fonctionnelle mais subtile faite de briques, de béton, de rivets, de trames régulières, sont conservés et mis en valeur. Le plus grand monde peut jouir de leurs volumes sans avoir à payer de droit d’entrée, démocratisant ainsi la culture. Ces perspectives démesurées permettant de rendre visibles des centaines d’enseignes d’un simple coup d’œil ! Et puis, pourquoi construire de nouveaux Belle Epine alors que les bâtis existent déjà un peu partout et sont parfois classés Monuments Historiques ? Le coût est supérieur, certes, mais la clientèle visée est également prête à dépenser plus. L’originalité a un prix.
Pour approfondir la problématique, qui est vraisemblablement insoluble, décortiquons un peu un exemple caractéristique de reconversion radicale qui provoque la folie à London sans que les scarabées ne bourdonnent. 
  
Battersea Power Station Animals Pink Floyd Phone Booth London Thames
 

Battersea, conception et style
Au Sud de Londres, sur les rives de la Tamise, se dresse, majestueuse mais décatie, la désœuvrée Battersea Power Plant Station (BPS). Un de ses architectes, Giles Gilbert Scott a également conçu deux autres emblèmes monumentaux, la Bankside Power Station londonienne, devenue depuis la Tate Modern, et la Cathedral Church Of Christ de Liverpool, ce qui fait de lui une sorte de prophète de la brique. Son rôle dans l’élaboration de la Battersea est très obscur d’une source à l’autre, il est cité comme l’architecte de l’usine, ailleurs il fut le responsable de l’architecture intérieure, quand il n’est pas décrit comme ayant été intégré à l’équipe de conception (emmenée par l’ingénieur en chef de la London Power Company, Dr Leonard Pearce) pour satisfaire l’opinion publique et penser l’extérieur de l’ouvrage. Non seulement son implication est très floue, mais il est impossible de déterminer précisément s’il a participé à la conception depuis l’origine du projet (la première phase, Station A) ou s’il a pris le train en marche.

Liverpool Cathedral grès rouge Giles Gilbert Scott
Cathedral Church of Christ, Liverpool

En tout cas, la famille Scott aura parfaitement fait jouer ses talents de relations publiques puisque c’est désormais ce nom que l’on retrouve un peu partout comme l’unique architecte de la Battersea, jusqu’à donner son nom aux faucons pèlerins qui nichent dans les cheminées.
Giles Gilbert Scott aurait surtout œuvré à peaufiner l’extérieur de l’ouvrage, et ne serait donc pas responsable des volumes intérieurs, de leur fonctionnalité, ni des époustouflants détails Art Déco qui ornent la plus ancienne partie. Les bibliographies regorgent d’images sublimes des intérieurs mais l’allure extérieure est évidemment le point clé de sa postérité, sa place douillette dans l’imaginaire collectif et sa légitimité dans le skyline anarchique de la ville. Comment une simple usine, aussi imposante soit-elle, a pu acquérir cette dimension que les promoteurs immobiliers, aujourd’hui, qualifient bien sûr de « mythique », allant jusqu’à vendre les lofts cossus qui y seront découpés comme « The first chance to own part of an icon » ? Est-ce là le seul fruit d’une nostalgie à son meilleur pour n’importe quelle relique d’un âge industriel conquérant doublé d’une référence pop assez convenue à l’album le plus boursouflé du Pink Floyd ? Mais si, il est boursouflé, avouez. La plus grande réussite est sa pochette.
Il y a d’abord le fait que ce bâtiment ne s’admire que de loin, depuis l’autre rive de la Tamise, depuis l’extérieur de sa zone de sécurité (les chutes de briques sont fréquentes depuis la mise à l’arrêt de l’usine et son exposition aux intempéries). De là, ses abords dégagés le mettent immédiatement en trait d’union entre le sol et le ciel, sa position légèrement surélevée et ses lignes verticales, strictes, rappelant l’image du château-fort. Ici, les douves sont les dix-sept hectares d’anciens réseaux de voies ferrées qui servaient à acheminer le charbon par wagons dans la gueule de la bête.


Ensuite, grâce au ciel tantôt nuageux, tantôt très nuageux, toutes les couleurs se reflètent sur ses briques sombres et sur ses cheminées blanches, et ces reflets doux alternent avec les ombres franches que le soleil découpe dans les créneaux de ses façades. La nuit, on peut imaginer qu’être au pied d’une des tours qui montent en dégradé jusqu’au cheminées, éclairées pleins phares en contreplongée, on doit se sentir à Métropolis ou à une avant-première de la RKO d’avant le début du cinéma parlant.
Il y a enfin l’assise de l’usine, sa sérénité indéfectible, son équilibre entre les dimensions verticales et horizontales, et l’élancement mesuré de ses cheminées, dans le pur style néo-gothique mâtiné d’Art Déco. On y pense et elle apparaît au monticule d’une petite colline alors que non, elle siège sur la morne plaine. Cheminées trop hautes et elles auraient été des aiguilles dans la meule de foin nuageuse des bords de la Thames River. Cheminées trop trapues, trop basses, et la BPS n’aurait donné qu’un gigantesque complexe horizontal. Le corps du bâtiment ou les assises des cheminées gagneraient-ils quelques étages, et tout le bâtiment serait devenu un monstrueux cube, comme une version anticipée du siège de la NSA à Fort Meade. Il n’y a qu’à se référer à la Battersea après sa première phase, composée de deux cheminées sur quatre, pour comprendre l’importance des proportions. Avec une seule moitié, l’usine est banale, allongée comme un lingot de houille ou un millefeuille au charbon.

Battersea Power Station Animals Pink Floyd Phone Booth London Thames


Battersea morne plaine
Il y a donc plus que de la mythologie rock’n’roll autour de cette usine, et des raisons diverses qui ont permis son inscription en monument historique de Grade II au Royaume-Uni : harmonie extérieure, patrimoine industriel, design intérieur, exemple majeur et inratable de l’inspiration originale du néo-gothique.
Mais voilà. L’usine ne fonctionnait plus depuis 1983, et les turbines de la Station A étaient déjà à l’arrêt depuis 1975 ; depuis cette époque, l’ensemble formait un gigantesque terrain vague. Au cœur d’une capitale versée dans la croissance urbaniste euphorique, voire anarchique, un tel espace vide représente une anomalie, qui peut se concevoir comme un no man’s land ou un poumon visuel. Une ancienne usine aux briques tombantes et aux terrains pollués de houille et d’hydrocarbures par cinquante ans d’exploitation, ce n’est pas exactement le bois de Vincennes ou Central Park, mais cela constitue un bon potentiel en termes de terrain de jeu infini : gambader à l’ombre de cheminées retapées, visiter des salles de turbines au sol de marbre et écouter l’écho dans d’immenses salles des machines aux ferronneries Art Déco…
La première idée pour utiliser le site fut d’ailleurs un grand parc ; à thèmes, quand même, avec grand huit et billet d’entrée, parce qu’il ne faut pas déconner. Le toit fut démoli mais le projet s’arrêta net. L’équipe de Chelsea envisagea un temps d’y implanter son nouveau stade, mais abandonna l’idée, même si on note des similitudes entre l’intérieur de la « cour » à ciel ouvert de l’usine et la forme carrée des stades britanniques, Stamford Bridge en particulier. La démolition totale de la vieille dame de briques branlante dut être un autre plan, jusqu’à son inscription aux monuments historiques. Cette perspective d’éradication apparaît « à première vue », « instinctivement »,  comme un crime, une grossièreté d’Attila : raser ce monument, vous n’y pensez pas !
Pourtant, entre, d’une part la démolition pure et simple, une photo souvenir, on dynamite puis on pleure un chef d’œuvre perdu ; ou d’autre part, la titanesque opération de régénération en cours, vampirisation dudit chef d’œuvre qui en dévoie tout le sens, le dilemme existe. 

Battersea Power Station Animals Pink Floyd Phone Booth London Thames

Ailleurs et pareil
Partout le phénomène est à l’œuvre : réinvestir les lieux. A Paris dans le XIIè arrondissement, un quartier naîtra sur les gravats du futur ex-tri postal, entre Daumesnil et la Gare de Lyon. Pour conserver un peu d’authenticité, trois trames de la gigantesque halle de béton seront conservées. Trois, sur les trente-et-une actuelles. Certes, toute la beauté des lignes de fuite et le vertige né des répétitions rigoureuses, tout cela aura disparu. Mais quand même, un spécimen est conservé. C’est un « vibrant hommage » en perspective, comme l’ultime vertèbre d’une espèce disparue. Et le vestige est monétisable : le futur habitant s’imaginera, habitant d’un quartier populaire avec un vécu populeux, un village, quasiment, avec des attaches ferroviaires et la proximité de Bercy…Les quelques voûtes de vieux béton mises sous cloche émettront de pâles pulsations de nostalgie qui permettront à notre Philistin de se sentir véritable titi parisien.
A Bordeaux, Nantes, Liverpool, partout où l’activité portuaire a engendré des kilomètres de docks et d’entrepôts désormais vides, on observe le même mécanisme : les ruines sont désormais flambant neuves des mêmes enseignes de prêt-à-porter et de prêt-à-manger.
En 2014, tous les décombres de la Seconde Révolution Industrielle ressuscitent. Tous ? Non ! Un petit village résiste encore et toujours à la revitalisation par la galerie commerciale. A Charleroi, les centrales à charbon sont vides, les entrepôts monumentaux en processus de lent délabrement. En ville, personne ne fait attention à ces vieilles reliques trop chères à démolir. Là, derrière de maigres clôtures qui ne dissuadent pas les animaux de gouttière, quelques marginaux font visiter ces vestiges d’une autre époque dans une ambiance post-apocalyptique. Réacteur de centrale électrique à vapeur envahie de mousse, d’obédience Terry Gilliam. Halle démesurée aux structures vaillantes autour desquelles le lierre s’enroule paresseusement. Hangar au toit crevé abritant quelques oiseaux et des restes d’engins rouillés.
Ainsi, au gré des opérations d’ampleur de redynamisation unanimement encouragées et saluées (toutes obédiences politiques confondues ? Hé oui. Cela aurait dû nous alerter) il ne restera bientôt plus que ce coin paumé de Wallonie pour errer dans les décombres à la recherche des fantômes des siècles passés, pour éprouver le déclin et l’immensité, le temps, l’espace, jouer à être des personnages perdus dans des tableaux de Turner ou Friedrich. Toutes choses bien compliquées dans une version fonte et rivets de Vélizy 2.
Plusieurs des lurons carolos (les habitants de Charleroi s’appellent ainsi, sans blague, c’est dire leur sens aigu de l’humour involontaire), artistes alternatifs planqués dans des entrepôts vides squattés ou parfois même achetés une bouchée de pain, estiment, désabusés, que « rien ne s’oppose à ce que Charleroi devienne le futur Berlin », comprendre, une ville à l’immobilier en plein boom, chère et snob, dont l’atmosphère s’est évaporée à l’instant où on a posé le regard dessus.
Il y a quand même une grande différence qui sépare Charleroi de la Battersea Power Plant et semble la protéger d’une gentrification mortifère : l’énergie délirante et absurde que plusieurs générations d’édiles, d’urbanistes et d’hommes d’affaires ont mise à faire capoter tous les plans de relance de la cité ouvrière, projets d’architecture et d’aménagement dont certains n’ont même jamais été achevés et dont les stigmates peuvent être admirés à travers la ville du Hainaut. Métro abandonné, perspectives de croissance non avérées, élaboration d’un réseau de voies express qui semble vouloir défier celui de Los Angeles…


Charleroi safari mine à ciel ouvert ruine urbaine
A Charleroi, mine à ciel ouvert

Acharnement et défiguration
Ailleurs qu’à Charleroi, les ruines valent de l’or. Certes, ne faisons pas la fine bouche, qu’un bâtiment londonien fasse l’objet d’une réflexion pour être préservé, c’est déjà ça, tant la capitale est plus portée sur la croissance urbaine désordonnée (et euphorique et parfois mal assortie) que sur les débats interminables sur l’opportunité de préserver telle ou telle borne de téléphone.
L’argument majeur du débat n’est pas artistique, ni patrimonial, encore moins romantique. Le pragmatisme œuvre pour le progrès et les lendemains qui chantent, d’où il n’y a rien de tel que la signature de quelques grosses pointures (Gehry et Foster, pour le design de certains lofts du futur condominium de Battersea) et l’argument du lieu chargé d’histoire pour emballer une opération juteuse et, au finale, tout sauf respectueuse.
Passons rapidement sur la plaisanterie de mixité du programme des surfaces : 47% de commerces, 53% de logements. Certes, cela est arithmétiquement équilibré, mais cette répartition rappelle plus une ville en blocs Lego constituée uniquement de « marchands » et de restaurants. Concernant la réappropriation du bâti : Rafael Viñoly (l’architecte) et la BPS Development Company sont intouchables puisqu’ils ont conservé le bâtiment en majeure partie. Comme il est écrit en introduction, quiconque critiquerait le projet se verrait opposer la botte imparable : « vous auriez préféré que tout soit rasé ? Voyez, nous retapons même les cheminées et allons redonner vie à ce quartier !».
Cet argument est inattaquable car la conservation reste le postulat de départ. Détruire ce serait trahir, laisser péricliter serait un crime. Mais…Acheter ses survêtements dans d’anciens docks où des damnés de la terre déchargeaient des caisses à bout de bras à longueur d’année, au-dlà d’une ironie très noire, n’est-ce pas une trahison pire encore ? Eviscérer ces bâtiments pour les farcir de jolies échoppes alternatives, les consolider pour en changer la destination, les rajeunir à l’infini, les travestir, leur faire subir des liftings successifs pour cacher le vieillissement…Il y a de quoi être surpris par un tel acharnement thérapeutique dans des sociétés aussi attachées au droit de mourir dignement.
Sur l’Ile Seguin, Jean Nouvel a eu le beau rôle, il est arrivé après la démolition des usines Renault dont la production a cessé en 1992. Il n’a pas eu à se poser la question de leur démolition, de leur réutilisation, ou de la mise sous cloche d’un échantillon.
 Alors oui, la BPS va peut-être revivre, son quartier sera certainement plus dynamique, ses parcs et avenues seront agréables et les appartements de luxe seront sans doute des bijoux aux vues imprenables. Soutenue par les modernes (et déjà banales) réalisations que les vues 3D promettent, rappelant le style lisse des quartiers-champignon de Dubaï, ce sera une bien belle momie. Mais la Battersea ne sera plus cette vieille dame voûtée et digne, solitaire et toujours majestueuse, demoiselle solitaire un peu pathétique qui toisait les passants égarés sous la pluie au bord de la Tamise. La BPS Development Company a inventé une fin alternative au film Sunset Boulevard : le personnage de Gloria Swanson, au lieu d’attendre à jamais un come-back sous les projecteurs du cinéma parlant, s’est faite offrir un ravalement intégral au Botox par ses petits-enfants. Grâce à ce coup de jeune, on la revoit sur les tapis rouges au bras de jeunes premiers, et elle a finalement décroché sa fameuse scène avec Mr De Mille.

Battersea Power Station Animals Pink Floyd Phone Booth London Thames


samedi 4 octobre 2014

Shelter from the storm

La lande désespérée, le brouillard, des chevaux sauvages, des moutons...


French Alps shelter wild horsesFrench Alps shelter wild horses

 Un refuge Hansel et Gretel abrite des enfants consanguins jouant à Leatherface pour passer le temps...Entre deux murailles infranchissables de pierre et d'ardoise, toi qui entre ici, abandonne tout espoir !

French Alps shelter wild horses

Leader-sheep

Leader-sheep

Des moutons moutonnant, dans les alpages alpins.

sheep moutons savoie Alps sépiasheep moutons savoie Alps sépia


dimanche 10 août 2014

Always The Sun

Le soleil, la plage.

always-the-sun-beach-cokin

La plage, le soleil.

Les acieries, le front de mer.

always-the-sun-beach-cokin

Cette sueur et ces bourrelets.

Ces paillettes et ces reflets.
Ce monoï et ces porcelets...


always-the-sun-beach-cokin

Faillite

Les bureaux ont fermé. On débarasse les lieux, siouplaît.

Gare de Lyon - guichets - salle des Fresques - friche industrielle
Gare de Lyon - guichets - salle des Fresques - friche industrielle

Ce n'est tout de même pas Detroit, mais de vieux fauteuils en cuir craqué trônent encore sur les hauts plateaux désertiques.
Gare de Lyon - guichets - salle des Fresques - friche industrielle
Gare de Lyon - guichets - salle des Fresques - friche industrielle


Depuis le déménagement on est au calme. Des gosses geignent au loin, mais cela reste supportable ; un genre de ressac. On n'est pas dérangé, on peut se concentrer sur les symétries.

Gare de Lyon - guichets - salle des Fresques - friche industrielle

Même le vent ne fait pas de bruit, il ne reste plus que deux vieux fantômes pour faire la ronde encore, et encore, alors qu'il n'y a plus rien à voler.



Gare de Lyon - guichets - salle des Fresques - friche industrielle

dimanche 29 juin 2014

Chambres d'enfants studieux

Dans les greniers abandonnés, les enfants oublient parfois de ranger leur chambre.

Paris - Gare de Lyon - combles - mansarde - loft - grenier - bureau



Paris - Gare de Lyon - combles - mansarde - loft - grenier - bureau

  Quelles mignonnes mansardes, sous les toits parisiens, l'endroit rêvé pour mener une vie de bohème

Paris - Gare de Lyon - combles - mansarde - loft - grenier - bureau

samedi 7 juin 2014

Cheminées d'usine arc-en-ciel

Surgissant des bords de la Seine, deux cheminées rainbow-style, c'est Ivry, c'est la fée électricité qui surgit depuis de grosses turbines.

Usine EDF Ivry Power plant

Usine EDF Ivry Power plant

Usine EDF Ivry Power plant






Sur le trottoir

La nuit est moite, le candélabre répand une lumière liquide à travers les feuilles lourdes du marronnier.

Sur le trottoir du quartier pavillonnaire, sa cigarette fume. Jambes croisées ou adossée à un réverbère, la putain attend son client.
Lecce prostituée réverbèreLecce prostituée réverbère



dimanche 4 mai 2014

Angles et agressions

L'Institut du Monde Arabe et la faculté de Jussieu, à Paris.

Bienvenue dans l'architecture déshumanisée, sombre et claire, réfléchissante, anguleuse et agressive.

Des beautés formelles de barres parallèles, il y a du travail derrière, tout ça pour créer des édifices du futur où l'échelle de l'homme n'a plus sa place. A première vue tout est vitré, certes, mais point de transparence : comme le siège de la NSA, le verre réfléchit seulement le regard interrogatif du passant ou du pigeon qui se demande quels obscurs secrets doivent être cachés à l'intérieur.

Les codes nucléaires ? 

Les tables de la Loi du Bon Goût, caché à jamais au pauvre quidam ?





Jussieu IMA Paris angles architecture moderneJussieu IMA Paris angles architecture moderne
 Ci-gisent les lignes courbes. Qu'elles reposent en paix.

lundi 21 avril 2014

Passants

Sans vouloir refaire le coup de Strangers In The Night...

Les inconnus en imper qui font claquer leurs chaussures sur les pavés brillants de pluie, les silhouettes découpées dans les phares de voiture...

Si ça ne rappelle pas Sinatra, ça évoque forcément Bogart, le privé en planque, le feutre mou qui cache le regard et protège le mégot incandescent de la bruine, le Colt dans la poche, et la femme fatale qui va foutre en l'air l'enquête...

Shadows Night Macadam BogartShadows Night Macadam Bogart


Shadows Night Macadam BogartShadows Night Macadam Bogart


Dans la ville ensoleillée

A Paris sous le soleil,
Il y a des visages figés, énigmatiques et froids.
Il y a des visages derrière des grilles, et des grilles devant des ombres.

Dans la ville éclaboussée de soleil,si tu veux croiser quelqu'un de réel, il reste toujours les statues.

Paris-statue-mendiant-passant-flouParis-statue-réverbère-passant-flou

Paris-statue-tuileries-passant-flouParis-statue-athena-passant-flou


mardi 8 avril 2014

Demoiselle Pommery

Dans les humides caves de l'illustre Champagne,
La blanche Demoiselle, épanouie, se pavane.

La Dame Pommery en bas-relief de chaux
Veille sur ses satyres du fond de son cachot.


Pommery Demoiselle Reims Champagne Satyre DionysosPommery Demoiselle Reims Champagne Satyre Dionysos




Pommery Demoiselle Reims Champagne Satyre Dionysos

samedi 29 mars 2014

Au vieux boucher




Boucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-Faubourg

Le plus vieux bâtiment du centre-ville s’affaisse sur lui-même. Ses façades lépreuses sont recouvertes d’un crépit qui s’écaille, année après année. Il n’a plus l’air d’abriter aucune activité, ses appartements sont vacants et sa boutique de plain-pied n’est, depuis longtemps, plus achalandée. Pour tout dire, il est hideux, et autour de lui, les autres bâtisses se foutent bien de sa gueule.



Boucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-Faubourg-bec fin

Boucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-FaubourgBoucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-Faubourg-lettre à lettre



Il y a, autour, la jolie petite boulangerie avec ses jolies boulangères niaises ; la maison du photographe à la façade art-déco ; la mairie néo-normande du début du XXè siècle, briques et meulière, gerbes de fleurs autour du monument au mort ; il y a, enfin, la brasserie qui rappelle le Paris tout proche, et les nouvelles constructions qui singent le hausmannien, toitures inclinées en zinc, rainures dans le béton pour imiter les séparations de pierre de taille et balcons forgés alignés, bien comme il faut pour les bourgeois soucieux d’investir mais réticent à trop d’audace architecturale. Le post-moderne, c’est bon pour les artistes et les bachi-bouzouks, rigolent-ils autour d’un apéro dinatoire.

Boucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-Faubourg

Et, donc, au milieu de cette joliesse parfois authentique, parfois pastichée, reste le vieil étron de la rue commerçante, avec son traiteur aux rideaux kitschs descendus pour toujours. Sa vitrine sert à placarder des affiches pour la prochaine brocante du Lions Club, le dernier album de Tunisiano ou des petites annonces de ménage. A la grande époque, le patron avait fait peindre sur la devanture un petit cochon, Naf-Naf vraisemblablement (il est vêtu de bleu, comme un maçon ; et puis c’est écrit sur ses fesses). L’ultime anthropomorphisme du porcelet tout heureux de se faire découper chez son charcutier favori, avec du persil dans le nez !

Boucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-Faubourg-kitschBoucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-Faubourg-naf-naf


A la vérité ce traiteur abandonné, ce vieux boucher rappelle furieusement les faubourgs d’il y a un demi-siècle, un siècle, les quartiers populaires juste au-dessus de la misère, ceux que Doisneau a tenté de magnifier et que Céline a dépeint dans tout leur dépouillement sordide. « Quand on habite à Drancy, on ne se rend même plus compte qu’on est triste ». Le juste milieu, ni romantique ni infernal, ces cours des Miracles peuplées d’escrocs salaces, de vieux dégueulasses et de blanches colombes, c’est peut-être l’ami Georges qui l’a le mieux dépeint, par exemple dans « La Princesse Et le Croque-Notes », ou mieux encore, « Le Bistrot » dont les paroles sont reproduites en fin d'article.


 C’est un vieux reste de cette époque qui subsiste au cœur du petit centre commerçant mignon. La grosse verrue subsiste certainement à la grâce de quelque propriétaire acharné que la Mairie n’arrive pas à exproprier. Quand, enfin, des pelleteuses mettront par terre le traiteur-charcutier du « Bec Fin », personne ne pourra être sérieusement déçu. Bof ; personne ne peut avancer que c’était mieux avant. Au moins restera-t-il ces quelques photos, témoignage d’un passé peu glorieux.

Boucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-Faubourg-kitsch

Mais…Après tout…Personne n’a dit qu’on ne devait se rappeler que des joyeuses visions de jeunes filles tournicotant dans leurs jupons de tulle blanc immaculés dans les rayons du soleil de printemps au milieu de la verdure parsemée de la rosée virginale du matin annonciateur de promesses glorieuses d’éternité bla-bla-bla ? Si ? On n’a droit qu’aux bons souvenirs ?

Boucher-Traiteur-Brassens-Banlieue-Faubourg



Dans un coin pourri
Du pauvre Paris,
Sur un' place,
L'est un vieux bistrot
Tenu pas un gros
Dégueulasse.

Si t'as le bec fin,
S'il te faut du vin
D' première classe,
Va boire à Passy,
Le nectar d'ici
Te dépasse.

Mais si t'as l' gosier
Qu'une armure d'acier
Matelasse,
Goûte à ce velours,
Ce petit bleu lourd
De menaces.

Tu trouveras là
La fin' fleur de la
Populace,
Tous les marmiteux,
Les calamiteux,
De la place.

Qui viennent en rang,
Comme les harengs,
Voir en face
La belle du bistrot,
La femme à ce gros
Dégueulasse.

Que je boive à fond
L'eau de toutes les fon-
taines Wallace,
Si, dès aujourd'hui,
Tu n'es pas séduit
Par la grâce.

De cette joli' fée
Qui, d'un bouge, a fait
Un palace.
Avec ses appas,
Du haut jusqu'en bas,
Bien en place.

Ces trésors exquis,
Qui les embrasse, qui
Les enlace ?
Vraiment, c'en est trop !
Tout ça pour ce gros
Dégueulasse !

C'est injuste et fou,
Mais que voulez-vous
Qu'on y fasse ?
L'amour se fait vieux,
Il a plus les yeux
Bien en face.

Si tu fais ta cour,
Tâche que tes discours
Ne l'agacent.
Sois poli, mon gars,
Pas de geste ou ga-
re à la casse.

Car sa main qui claque,
Punit d'un flic-flac
Les audaces.
Certes, il n'est pas né
Qui mettra le nez
Dans sa tasse.

Pas né, le chanceux
Qui dégèlera ce
Bloc de glace.
Qui fera dans l' dos
Les corne' à ce gros
Dégueulasse.

Dans un coin pourri
Du pauvre Paris,
Sur un' place,
Une espèce de fée,
D'un vieux bouge, a fait
Un palace.